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 Constantin Joseph Manesse – le sextuple assassinat de Favril - 1865

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Adelayde
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Constantin Joseph Manesse – le sextuple assassinat de Favril - 1865 Empty
MessageSujet: Constantin Joseph Manesse – le sextuple assassinat de Favril - 1865   Constantin Joseph Manesse – le sextuple assassinat de Favril - 1865 EmptyJeu 8 Déc 2011 - 17:22


Joseph Manesse – Le sextuple assassinat de Favril

À cinq kilomètres de la triple enceinte de Landrecies (Nord), est le petit village de Favril qui compte 600 habitants. C'est dans ce village que s'est commis le sextuple assassinat dont nous entretenions hier nos lecteurs.
Les maisons, bâties en brique rouge, couvertes en chaume, n’ont qu'un rez-de-chaussée, et sont espacées par de petites ruelles donnant sur des champs cultivés.

La maison où s'est accompli le crime est basse, couverte en tuiles plates, ayant deux portes sur la façade et quatre fenêtres, dont deux de chaque côté des portes.
L'écurie, l’étable et le grenier à foin sont situés sur le derrière du bâtiment avec lequel on communique par une porte basse et obscure.
Une porte de sortie servant aux bestiaux, fermée par un simple loquet de bois, donne sur une ruelle qui descend vers un champ de blé.
À l'est, c'est à dire à droite de la maison, est un chemin conduisant aussi sur le même champ.
Cette maison est située sur la place même du village, vis-à-vis d'une auberge d'assez bonne apparence et non loin de l'église dont le clocher pointu s'élance dans les airs.

C'est là que toute une famille, composée de six personnes, a été massacrée par une main inconnue.
Et comme le vol n'était pas le mobile du crime, puisqu'on a trouvé 200 fr. intacts dans le tiroir d'une table, on se perd en conjectures sur le mystère qui enveloppe encore cette affaire.
Voici, d'après les premières investigations de la justice, ce qu’on est fondé à croire sur cet horrible attentat.

Isidore Largillière, cultivateur âgé de 48 ans, aimé et estimé de toute la commune, rentrait ses chevaux à l'écurie. Son fils, jeune homme de 18 ans, le suivait à quelque distance ; à peine son père a-t-il fait quelques pas, qu'il se sent frapper sur la tête d'un terrible coup de maillet de fer. Il tombe sans pousser un cri tant le coup a été rapide et c'est étendu sur le fumier de ses chevaux qu'il reçoit encore huit ou dix coups de l'arme meurtrière.
À ce moment, son fils entre dans l'écurie ; un coup du même instrument l'étend sur le corps de son père, et leur sang se mêle !

Cependant, au bruit inusité qu'elle entend, sa fille, jeune personne de dix-sept ans, veut voir ce qui se passe et entre dans l'étable où le drame vient d’avoir lieu.
Au même instant, un horrible coup de marteau qu'elle reçoit sur la tête, la fait chanceler. Elle pousse un cri terrible, tombe la face contre terre, baignée dans son sang, et expire sur le corps de son père et de son frère.
L'assassin va sans doute prendre la fuite ; l'obscurité le favorise, il ne sera pas découvert.

Mais, au cri suprême de la jeune fille, sa mère était accourue de la chambre voisine. Elle porte une chandelle allumée pour se rendre compte du cri qu'elle a entendu.
Soudain, l'assassin qui va être reconnu se précipite sur cette malheureuse femme, souffle sa bougie, lève le bras et l'étend sanglante sur le seuil de la porte qui conduit à l'écurie.

Quatre cadavres sont là, nageant dans leur sang, râlant l'agonie. Les gens du voisinage entendent bien quelque bruit, mais ils pensent que c'est le père qui soigne ses chevaux ou la famille qui vaque aux soins du ménage. D'ailleurs, il n'est que sept heures, presque jour encore ; comment supposer qu'un crime vient de s'y commettre ?
Ils ne font donc nulle attention à ce qui se passe à l'intérieur de cette fatale maison, et le meurtrier, avide de sang, les yeux terribles, son marteau de fer à la main, où sont adhérents des cheveux de ses victimes, semble attendre encore !
Quatre cadavres sont là, ce n'est pas assez. Il pénètre dans la salle à manger contigüe à l'écurie.

La sœur du malheureux cultivateur est à table avec sa fille.
D'un coup de marteau, l'assassin les frappe par derrière ; la cervelle de l'une rejaillit sur l'autre ; elles tombent la face contre la table, il frappe encore !
La table elle-même est presque défoncée, tant ses coups sont redoutables !
Alors, par un suprême effort, la jeune fille a encore pu se traîner sur le seuil de sa porte, fait quelques pas et tombe inanimée sur la terre humide où ce matin encore se voyait une mare de sang !

Pendant que ce nouveau drame se passait, dans la chambre voisine du premier meurtre, la femme Largissière était survenue, ignorant cette boucherie.
Au même instant, le monstre qui se voit perdu par ce témoin, se précipite sur elle, et d'un revers de son terrible marteau lui laboure le visage et lui fracasse la mâchoire. Elle tombe foudroyée, pendant que le misérable prend enfin la fuite par la porte de l'étable, donnant sur un chemin désert.

Voilà donc six meurtres accomplis dans l'espace d'un quart d'heure, à sept heures du soir, au milieu d'un village, et accomplis par un seul individu !
Cependant un passant aperçoit une femme étendue sur le bord du chemin ; il s'approche, voit qu’elle est assassinée, et court avertir les habitants.
On s'assemble, on accourt, on pénètre dans l'étable, dans la maison, et l'on voit l'horrible spectacle !
Mais l'assassin a disparu, on cherche partout, nulle trace. On sonne le tocsin ; toute la population est en alerte ; chacun se met en campagne ; la gendarmerie monte à cheval, elle inspecte les buissons, les fossés, interroge la commune entière, rien ! Il semble que l'esprit du mal seul ait fait tout cela ! Et pendant que les paysans assemblés regardent d'un air ahuri les malheureuses victimes qui râlent encore, les médecins d'Avesnes et de Landrecies leur prodiguent leurs soins désormais inutiles.

Aujourd'hui, tout est deuil et silence dans ce village, naguère si gai.
La malheureuse mère, couchée dans son lit, le crâne déchiré, le menton fracassé, la langue paralysée, ignore encore toute L'étendue de son malheur !
L'autorité a empêché que l'on effaçât les traces du crime ; c'est ainsi que l'on voit, sur la porte la silhouette sanglante de la petite main de la jeune fille, non loin des traces effrayantes de l'agonie de ses infortunés parents.

C'est hier à dix heures et demie qu'a eu lieu l'enterrement des victimes.
Les cinq cercueils étaient portés à bras et se suivaient lentement jusqu'au cimetière du village.
Les populations de Maroilles, de Favril, de Landrecies étaient accourues pour assister à la lugubre cérémonie ; et quand on descendit dans la terre humide les tristes restes des deux jeunes filles et de leurs parents, les sanglots éclatèrent de toutes parts. À midi, tout était fini, et chacun reprenait le chemin de son village, faisant des vœux pour que ces crimes épouvantables ne restent pas impunis.

Marc
Le Petit Journal, n° 781 du 22 mars 1865


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Une arrestation, qui a été opérée dans les environs de Valenciennes, paraît se rattacher à l'affaire du Favril. Deux individus, dont un déjà d'un certain âge, ont été surpris dans les marais au moment, où, accroupis au bord d'un fossé, ils étaient occupés à laver des linges ensanglantés. Étrangers au pays, et n'ayant pu, dit-on, donner des explications satisfaisantes sur l'emploi de leur temps, ils auraient été mis en arrestation et conduits la maison d'arrêt de Valenciennes.

La Presse, 27 mars 1865

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L'instruction de l'assassinat de Favril se pousse avec vigueur, dit le Journal de Saint-Quentin.
Depuis quelques jours, la femme Largilière est plus malade. Son état inspire de très sérieuses inquiétudes. On croit qu'elle a été vivement affectée en apprenant l'arrestation de Manesse Largilière, son beau-frère, et cette circonstance donne à penser que cet homme pourrait bien être le coupable, car on assure qu'il avait eu des relations coupables avec elle, ce qui expliquerait le mutisme obstiné de cette malheureuse. Manesse est marié; il a deux enfants mais sa conduite est depuis longtemps déplorable, et il a dépensé toute sa fortune par son incurie et ses débauches. C'est lui qui, un des premiers, était sur les lieux du crime et a voulu guider la justice.

La Presse, 14 avril 1865

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Le Mémorial de Lille apprend que, par suite de l'arrêt d'évocation rendu par la cour impériale de Douai, à propos du sextuple assassinat de Favril, M. le conseiller Duhem, faisant les fonctions de juge-instructeur et M. Pinart, procureur général, assistés de M. Dupuis, l'un des greffiers de la cour, sont partis lundi matin pour se rendre en la commune de Favril et y continuer l'information de cette affaire.

La Presse, 2 juin 1865

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Le mystère de l'assassinat de Favril est enfin éclairci. Manesse, que deux brigades de gendarmes avaient amené à Landrecies pour être confronté avec les témoins, a fait des aveux complets à l'un des gendarmes qui le surveillaient, Il a désigné l'endroit où se trouvait la hache dont il s'est servi pour commettre le crime et qu'il avait enfouie dans le poulailler de la maison Largillière.
L’Observateur d'Avesnes ajoute après avoir donné cette nouvelle :
« Nous ne croyons pas devoir nous faire l'écho des bruits qui circulent sur le rôle qu'aurait joué la femme Largillière dans cette épouvantable tragédie : la justice fera à chacun la part qui lui revient. En publiant les nouvelles qui précèdent, nous voulons surtout rassurer les populations. Le sextuple assassinat de Favril, quelque épouvantable qu'il soit, n'est plus une menace pour la sécurité publique, c'est un de ces tristes drames de famille, sur lequel la justice, en portant bientôt la lumière, fixera l'opinion publique d'une façon définitive. »

La Presse, 10 juin 1865

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Cour d’assises de Douai (Nord) Les assassinats du Favril

Nous avons rappelé, en quelques lignes, avant-hier, les faits qui sont déférés à la cour d'assises du Nord.
Nous, croyons important, à la veille des débats, de bien établir tout ce qui est connu sur ce drame terrible.

Le 17 mars dernier, un des principaux cultivateurs du Favril, canton de Landrecies, Isidore Largillière, était assassiné dans son écurie, au moment où il ramenait ses chevaux du travail : à côté de lui, tombaient, presqu'au même instant, son jeune fils et sa fille Bibiane, âgée de dix-sept ans; puis sa sœur et la jeune fille de celle-ci, accourues à leurs cris de terreur ; et enfin, dans l'obscurité d'une salle basse, où elle attendait son mari, et ses enfants, la femme Largillière elle-même était grièvement blessée : elle seule a survécu ; elle est aujourd'hui hors de danger.
Les six victimes avaient été frappées par le même meurtrier, avec la .même arme.
La rumeur publique désigna comme l'auteur présumé de ces crimes le nommé Manesse, cultivateur au Favril, beau-frère d’Isidore Larguillère, homme de mœurs dissolues, redouté dans le pays à cause de ses débauches et de la violence de son caractère.
Manesse a été retenu par la justice comme accusé du sextuple assassinat du Favril.
L'acte d'accusation, que nous espérons être en mesure de publier dès demain, nous apprendra sans doute ce que nous ignorons, c’est-à-dire quelles preuves, quels témoignages auront pu s'amasser contre Manesse, au cours de la longue et minutieuse instruction commencée depuis plus de-deux mois.

On parle cependant de la froide insensibilité dont l’accusé a fait preuve en recevant la nouvelle de la mort de son beau-frère et des enfants de celui- ci ; de l'empressement suspect qu'il a mis à détourner les soupçons par des protestations intempestives, de ses variations dans ses divers interrogatoires ; et enfin de l'intérêt qu'il avait à recueillir la succession des malheureuses victimes de l'odieux attentat du 17 mars.
Manesse est âgé de cinquante-deux ans ; il est né en 1813, à Favril même ; il était aussi connu sous le surnom du Grand-Dumoulin.

Ainsi que nous l'avons annoncé, c'est demain samedi que s'ouvrent, devant la cour d'assises de Douai, les débats de cette grave affaire.
Le siège du ministère public sera occupé par M. le procureur général Pinard.
La défense, de l'accusé sera présentée d'office par M° Edmond Lemaire.
Notre correspondant spécial nous écrit que, de tous côtés, les curieux affluent à Douai pour assister aux audiences de la cour d'assises.
Le Petit Journal publiera un compte-rendu détaillé de ce grand procès criminel.

Le Petit Journal, n° 917 du 5 août 1865

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On sait que c'est demain samedi que l'affaire des six assassinats du Favril sera appelée à l'audience de la cour d'assises du Nord. Aucun complice n'est poursuivi avec Manesse, et il ne paraît pas qu'il en dût avoir ; les sentiments de jalousie ou d'amour repoussé dont on avait parlé ont disparu de l'instruction, et le mobile du crime ne semble pas être en proportion avec la gravité qui le caractérise et la légitime émotion qu'il a causée dans le pays. Manesse a fait des aveux complets et a renoncé à accuser les personnes qu'il avait constamment indiquées. L'accusation sera soutenue; comme nous l'avons dit, par M. le procureur général Pinart, et la défense présentée d'office par M° Edmond Lemaire.

La Presse, 5 août 1865

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La cour de cassation (chambre criminelle), présidée par M. Legagneur, a rejeté hier !e pourvoi du nommé Joseph Manesse, dit le Grand Dumoulin, contre l’arrêt de !a cour d'assises du Nord, séant à Douai, qui l'a condamné, le 5 de ce mois, à la peine de mort, comme coupable d'assassinat et de cinq homicides volontaires commis au Favril; petite commune située près d'Avesnes.

La Presse, 26 août 1865


Dernière édition par Adelayde le Lun 2 Avr 2012 - 19:48, édité 4 fois
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MessageSujet: Re: Constantin Joseph Manesse – le sextuple assassinat de Favril - 1865   Constantin Joseph Manesse – le sextuple assassinat de Favril - 1865 EmptyJeu 8 Déc 2011 - 17:30


L’exécution

Nous lisons dans le Journal populaire de Lille :
« C'est ce matin, à six heures précises, que l'assassin du Favril a été exécuté sur la place publique de Landrecies. À cinq heures et demie il descendait de voiture, venant de Valenciennes, accompagné de la gendarmerie. Les tristes apprêts de la toilette ont eu lieu aussitôt, et à six heures juste il montait avec calme les sinistres gradins, et s'adressant à la foule immense qui l'entourait, il s'écria d'une voix ferme :
« Adieu, tertous, adieu, min garchon Joseph » et il répétait encore « Adieu Joseph », que l'exécuteur le saisissant, le plaça sur l'appareil, et en une seconde, la justice dus hommes était satisfaite.

La Presse, 11 septembre 1865

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Exécution de Manesse - Le Cateau, 9 septembre 1865.

Depuis jeudi, on savait ici que l'exécution devait avoir lieu aujourd'hui samedi sur la place de l’Esplanade de Landrecies, la place principale de la ville manquant d'une étendue suffisante pour contenir la foule ; et hier on avait appris que Monsieur de Douai et son fils, accompagnés de Monsieur d'Amiens, étaient passés par notre gare à deux heures du soir.

Malgré les déceptions des jours précédents, - depuis plusieurs jours déjà on attendait l'exécution, – un grand nombre d'habitants de notre ville se sont portés à Landrecies; ils y ont trouvé une foule considérable stationnant sur la place où se dressait l'instrument du supplice:
Vers cinq heures et demie du matin, une chaise de poste venant de Valenciennes et escortée de plusieurs brigades de gendarmerie, arrivait aux portes de Landrecies. Elle contenait Manesse, un prêtre, deux gendarmes à l'intérieur et deux autres au-dessus de la voiture.
Cette voiture fendit la foule à grand'peine traversa la porte, qui fut aussitôt fermée au grand désappointement de deux mille à deux mille cinq cents curieux qui ne purent entrer en ville ; puis elle déposa le patient dans le corps-de-garde- de celle porte, où l'on procéda à la toilette du condamné.

Pendant tout le temps que dura cette lugubre opération, Manesse ne donna aucun signe de faiblesse ni de triste préoccupation. Il fit, au contraire, avec un sang-froid étonnant, ses dispositions testamentaires, par la main d'un agent de police, et répondit avec un cynisme repoussant aux exhortations du jeune prêtre chargé d'adoucir ses derniers moments.

À six heures moins dix minutes, la porte du corps-de-garde s'ouvrit, et Manesse, qui ne voulut point d'aide, monta seul dans la charrette qui devait le conduire au lieu du supplice, éloigné à peine d'une trentaine de mètres.
Arrivé au pied de l’échafaud, Manesse, qui n'avait rien perdu de son calme, sauta à terre aussi lestement qu'il put le faire avec ses pieds entravés, et monta sans être soutenu sur la plate-forme de la guillotine. Là, après avoir vivement embrassé le prêtre et le bourreau, il prononça ces paroles :
« Je vous recommande mon fils… Au revoir mes amis, à revoir tertous ; on va me couper la tête… »
Il répétait ces derniers mots quand, poussé sur la planche, il fit la bascule, et l'assassin du Favril avait expié son crime.
Cette exécution s'est faite avec l'instrument ordinaire c'est dire non pourvu d'un nouveau mécanisme, comme celui dont on avait parlé à propos de l'exécution de Picot, à Marseille. Quoique l'opération ait été faite aussi rapidement que possible, il y a eu un court moment où elle s'est trouvée suspendue sans doute par suite d’un mouvement fait par le condamné ; tel est du moins le récit qui nous a été fait par plusieurs témoins dignes de foi.

On évalue assez diversement le nombre des assistants ; les uns pensent qu’il ne dépassait pas 10 000 ; les autres le portent de 15 à 18 000, en y comprenant toutefois les personne qui n'ont pu rentrer en ville et celles qui se trouvaient aux fenêtres des maisons situées sur l'Esplanade.
L'échafaud faisait face à la ville ; il était dressé près de l'Esplanade, à l'extrémité occidentale de la place ; il était entouré par une compagnie de troupe de ligne, un grand nombre de gendarmes et un escadron de dragons, et le public était tenu à une assez grande distance.
Pendant l'exécution et tout le temps qui l'a précédée ou suivie, aucune manifestation n'a eu lieu, aucun cri ne s'est fait entendre, et, au moment du coup fatal, régnait le plus profond silence. Les femmes étaient aussi nombreuses que les hommes, mais elles n'ont donné lieu à aucune remarque particulière.

Un dernier mot surjette journée. Vers deux heures du matin, la femme Manesse, qui revenait de Douai faire ses adieux à son mari, a traversé la ville au milieu de la foule. La présence de cette femme, à cette heure, et sur la place même où son mari devait payer de sa tête ses actes criminels, a péniblement impressionné toutes les personnes qui l’ont vue.

Dumesnil. - Journal du Cateau


L’observateur d'Avesnes ajoute le renseignement suivant :
Aussitôt l'exécution terminée, le corps du supplicié a été enlevé et transporté au cimetière de Landrecies où il a été inhumé provisoirement jusqu'au jour très prochain où il devra, sur la demande de la famille et suivant l'autorisation de M. le sous-préfet d'Avesnes, être transféré au Favril où aura lieu l'inhumation définitive.

Le Petit Journal, n° 954 du 11 septembre 1865

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MessageSujet: Re: Constantin Joseph Manesse – le sextuple assassinat de Favril - 1865   Constantin Joseph Manesse – le sextuple assassinat de Favril - 1865 EmptyJeu 8 Déc 2011 - 17:31

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Le Petit Journal, n° 955 du 12 septembre 1865
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MessageSujet: Re: Constantin Joseph Manesse – le sextuple assassinat de Favril - 1865   Constantin Joseph Manesse – le sextuple assassinat de Favril - 1865 EmptyVen 9 Déc 2011 - 12:55

Citation :
Monsieur de Douai et son fils, accompagnés de Monsieur d'Amiens

On retrouve bien dans cet article l'ancienne appellation des exécuteurs de province, selon l'endroit où ils exerçaient leur office.

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MessageSujet: Re: Constantin Joseph Manesse – le sextuple assassinat de Favril - 1865   Constantin Joseph Manesse – le sextuple assassinat de Favril - 1865 EmptyVen 9 Déc 2011 - 17:51


La date du mariage de Constantin Joseph Manesse et Elisa Joseph Largillière est mentionnée sur le site du Cercle Historique et Généalogique de Berlaimont (18/04/1849) mais impossible de trouver les actes de naissance, de mariage et de décès.


http://chgb59.free.fr/actes/tab_mari.php?args=Le+Favril+[Nord],MANESSE

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MessageSujet: Re: Constantin Joseph Manesse – le sextuple assassinat de Favril - 1865   Constantin Joseph Manesse – le sextuple assassinat de Favril - 1865 EmptySam 10 Déc 2011 - 15:41

Bel exposé Adelaïde ! Merci beaucoup !
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