Texte inédit, prévu pour être inséré dans Le Couperet de l'éternité mais conservé dans un fichier Word faute de place.
Les deux petites principautés limitrophes de la France auraient pu, à tour de rôle, être concernées par l’usage de la guillotine, cependant, il n’en fut rien.
Adieu la potence à Andorre ! A compter de 1854, le prince Josep Caixal i Estradé, evêque d’Urgell , introduit l’usage du garrote vil, le collier de métal étrangleur en usage dans l’Espagne voisine depuis 1822 - et qui le restera jusqu’en 1974.
Le 29 février 1860, dans la prison de la Casa de la Vall , a lieu la seule utilisation de cet instrument sur le fermier criminel Juan Mandico, qui avait tué un an plus tôt à coups de couteau le nommé Gil Areny pour le voler. L’identité du bourreau – il n’y en avait plus en activité dans la principauté depuis peut-être trois siècles ! – reste imprécise : certaines sources prétendent qu’il était français, d’autres le disent andorran.
Trente-six ans plus tard, la scène aurait pu se reproduire, mais le matricide Manuel Baco, jugé le 28 mars 1896, bénéficia d’une grâce inespérée, suivant une tradition séculière : les condamnés d’Andorre étaient exposés au peuple juste avant d’être conduits à la mort. Si dans le public, une seule personne réclamait sa grâce, celle-ci était automatiquement appliquée… Le 17 avril, Baco eut cette chance, et partit donc purger sa peine de travaux forcés à perpétuité en Nouvelle-Calédonie, ou il mourut en 1898.
Il fallut près d’un demi-siècle pour que le tribunal des Corts rende un nouveau verdict capital. Hasard de la vie, le condamné de ce 15 octobre 1943 s’appelait Pere Areny-Aleix, et il était l’arrière-petit-fils du fermier tombé sous les coups de Mandico ! La nouvelle victime ? Elle n’est autre que son propre frère, Antoni, abattu deux mois plus tôt à coups de fusil de chasse pour profiter plus rapidement de son héritage. Trois jours après le verdict, le 18 octobre, c’est en public, aux abords du cimetière, à la Roureda de Moles, qu’Areny est passé par les armes, fusillé par un peloton composé d’hommes de la police d’Andorre. Les vives protestions de la part des policiers chargés d’abattre Areny – certains préférant même démissionner plutôt que d’obéir - joueront sans doute sur les mentalités des juges. Ce sera la dernière fois qu’Andorre connaîtra la sentence suprême, devant attendre 1993 pour définitivement rayer de la loi la peine capitale.
L’histoire de la peine de mort à Monaco se résume plus succinctement encore : non seulement les crimes de sang n’étaient pas nombreux sur ce territoire de 2 km², mais de plus, d’une façon quasi-certaine, la guillotine n’y fut jamais la bienvenue ! En effet, quel prince souverain aurait accepté de voir sur le Rocher se dresser une machine identique à celle qui, le jour-même de la chute de Robespierre, avait décapité Marie-Thérèse, la bru du prince Honoré III ?
Enclavée de 1815 à 1860 au sein du royaume de Sardaigne, qui lui accorde un statut de protectorat, la principauté connut probablement la dernière exécution de son histoire à cette période. La date de 1847 est souvent avancée, mais sans plus de détails sur le crime ainsi puni, encore moins l’identité de l’auteur, et les registres d’état-civil n’en confirment rien. On peut tout de même présumer qu’on employa à cette occasion la méthode prescrite par la loi sarde, à savoir la pendaison.
En décembre 1907, la presse française fit ses gros titres sur la condamnation à mort de Marie-Rose Girodin, alias lady Violette Goold. Cette roturière, épouse d’un Anglais, authentique baronnet, ivrogne et escroc , était à l’origine d’une des plus célèbres affaires de « malle sanglante » de la Belle Epoque, malle dans laquelle elle avait caché les restes dépecés de sa malheureuse dame de compagnie ! Le crime avait été découvert à Marseille, mais commis à Monaco, et ce fut donc le tribunal criminel de la principauté qui dut décider du sort du couple meurtrier ! La mort fut une décision saluée, bien qu’assez inattendue, et dans l’optique de l’époque, l’idée de devoir requérir les services de Deibler sur la Riviera (pour supplicier une femme qui plus est !), entraîna tout naturellement une commutation de peine. Aucun des deux époux ne survécut longtemps à son incarcération.
Si d’autres procès assez retentissants eurent pour théâtre la salle d’audience monégasque, aucun ne s’acheva plus sur une condamnation à mort, et le châtiment suprême fut finalement aboli le 17 décembre 1962.
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"Les humains, pour la plupart, ne se doutent de rien, sans envie ni besoin de savoir, ça leur va comme ça, ils croient avoir de l'emprise sur les choses.
- Mh... pourquoi en avoir fait un secret ? Ils peuvent comprendre, ils sont intelligents...
- Une personne, sûrement, mais en foule, on est cons, on panique comme une horde d'animaux, et tu le sais."