C'est comme les trois coups au théâtre au moment du lever du rideau, et ces trois coups de la bascule rabattue à l'horizontale et encastrée dans la fenêtre, et de la faux qui dans un
crash vertigineux coulisse entre les jumelles, procurent apparemment aux infortunés privés du sens de la vue un plaisir supérieur à celui des voyants réduits à des aperçus tronqués par la soldatesque à pied et à cheval qui leur masque aux trois quarts la plate-forme dressée là-devant à un petit deux mètres de hauteur.
Si bien qu'entre l'automne de 1792 et l'été de 1793 sur la place de la Révolution, s'ils n'ont pas réussi à monter sur le socle de la statue équestre de Louis XV déboulonnée au lendemain du 10-Août et que la Liberté de Jacques-Louis David et François-Frédéric Lemot occupera tout à l'heure, les curieux ne discernent pas grand'chose du spectacle qu'ils espéraient voir à moins qu'ils n'aient persuadé un voisin complaisant de leur trentième ou de leur quarantième rangée de les prendre sur ses épaules.
Tandis que le non-voyant qui s'est mêlé à la foule dans le but d'en capter l'ambiance sonore, et qui emmagasine de toutes ses oreilles les trois coups de la bascule et du couteau, rentre ensuite chez lui sans avoir été désagréablement frustré dans ses attentes : «Un aveugle se faisait conduire chaque jour aux exécutions : «Je ne vois rien mais j'entends», expliquait-il, et «cela suffit à mon plaisir» (Jean Tulard,
La Révolution française à travers les collections du Musée Carnavalet, Éditions Paris-Musées, 1989, page 113).
Des curieux agglutinés sur le socle de la statue équestre de Louis XV déboulonnée
sur la place de la Révolution dans le
Scarlet Pimpernel d'Harold Young (1934).