Nom prédestiné que celui-ci...
En 1946, à huit mois d'intervalle, deux crimes de sang y sont commis. Deux crimes bien similaires :
- le 13 avril 1946, Julien Galland, chauffeur de taxi, est assommé puis poignardé à quatre reprises. Son corps est retrouvé le lendemain dans un petit ravin qui borde le chemin de Dampierre. Ses clients lui ont volé son portefeuille, contenant 15.000 francs, ainsi que les papiers de sa Peugeot 402.
- le 9 décembre 1946, Julien Hoffmann, chauffeur de taxi, est blessé mortellement d'une balle de revolver par son client, qui lui dérobe 52.000 francs, et qui prend un automobiliste en otage jusqu'à Nancy pour s'enfuir.
Dans la première affaire, les criminels sont au nombre de trois. Polonais, soldats âgés d'une vingtaine d'années, ils s'appellent Jan Kwiatkowski, Czelaw Zajackowski et Bronislas Bartos. Ils avaient besoin d'argent pour racheter un accordéon (!) mis en gage pour la somme de 42.000 francs. Ils sont arrêtés au bout de six jours, notamment à cause du signalement de Bartos... ce dernier a en effet une oreille coupée.
Pour la seconde, le responsable est un seul homme, nommé Théodore Brière, 32 ans, repris de justice sans le sou. Il est capturé moins de deux jours après son crime... Il avait osé demander à sa victime, en arrivant aux abords de la Veuve, de le conduire exactement sur les traces des Polonais meurtriers ! Un "copycat", d'une certaine manière. Il est identifié en particulier à cause d'un détail physique : il a été amputé du majeur gauche.
Après deux jours de procès, le 9 juillet 1948, la cour d'assises de la Marne prononce contre Bartos une sentence de travaux forcés à perpétuité. Zajackowski et Kwiatkowski devront avoir la tête tranchée. La peine est de fait exécutée à l'aube du 17 décembre 1948 dans la cour de la maison d'arrêt de Reims. Ce sera la dernière venue de la guillotine dans la Marne.
Le 4 mai 1950, Brière passe à son tour en jugement. Tout comme les Polonais, il est condamné à la peine capitale. Il bénéficie d'une grâce présidentielle le 27 octobre 1950. Il est le dernier condamné à mort du département.
Au passage, le moins qu'on puisse dire pour Brière est qu'il a mal choisi sa période pour commettre son crime. Cinq jours plus tôt, le 4 décembre 1946, un autre chauffeur de taxi, Jean Becker, a été abattu sur la route de Gravelotte, en Moselle, et la police de l'Est est sur les dents pour attraper son meurtrier... lequel sera arrêté quelques jours plus tard à Paris, non sans avoir au passage abattu un second taximan, Benjamin Teyre, dans la Saône-et-Loire le 11 décembre. Il a 18 ans et s'appelle Michel Watrin. Le jeune garçon, condamné deux fois à mort par les assises de la Moselle (9 mars 1949) et celle de la Saône-et-Loire (27 avril 1950) sera décapité à Metz le 12 juillet 1950.
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"Les humains, pour la plupart, ne se doutent de rien, sans envie ni besoin de savoir, ça leur va comme ça, ils croient avoir de l'emprise sur les choses.
- Mh... pourquoi en avoir fait un secret ? Ils peuvent comprendre, ils sont intelligents...
- Une personne, sûrement, mais en foule, on est cons, on panique comme une horde d'animaux, et tu le sais."