Peine de mort en Chine

Encore une condamnation à mort avec sursis d'un cadre dirigeant chinois : Li Hua, ancien PDG de China Mobile (la première compagnie chinoise de téléphonie mobile) au Sichuan a été reconnu coupable de corruption et condamné à mort.

Sa peine a été assortie de deux ans de sursis. S'il se comporte bien en prison pendant ces deux ans, la peine capitale sera probablement commuée en prison à vie. C'est ce qui se passe d'habitude quand la mort est prononcée avec sursis.

Un paysan chinois nommé Li Changkui a été exécuté jeudi.

Il avait été reconnu coupable d'un double meurtre et d'un viol. Mais au-delà de l'application de la loi chinoise, l'histoire de sa condamnation à mort montre l'emprise de l'opinion publique sur l'appareil judiciaire. Il a fallu trois procès et deux années pour aboutir à sa condamnation, ce qui est tout à fait exceptionnel en Chine.

Liu Xiang, le principal inculpé dans l'affaire des cochons dopés au clenbutérol, a été condamné à mort avec deux ans de sursis (ce qui revient à le condamner à la prison en vie s'il se tient à carreau pendant ces deux ans).

L'affaire avait éclaté en mars dernier quand un employé de l'industrie agro-alimentaire avait constaté que les carcasses de cochons étaient fluorescentes...

Ce qui est étrange dans le jugement qui a vu condamner plus de 100 personnes en même temps que Liu Xiang, c'est que la gradation des sentences suit exactement le ressenti exprimé par les bloggeurs sur cette affaire : la mort pour Liu Xiang, la prison à perpétuité pour son complice Xi Zhongjie, de la prison ferme pour les fonctionnaires qui ont laissé faire, des peines avec sursis pour les dizaines d'éleveurs qui ont acheté le clenbutérol à Liu. Deux salauds hors norme, des fonctionnaires incapables, le petit peuple victime : la Chine révèle le regard qu'elle jette sur son système.

Un ressortissant philippin de 35 ans qui avait été arrêté en 2008 dans un aéroport chinois en possession de 1,5kg de drogue a été exécuté en Chine le 8 décembre 2011.

L'intercession du président philippin, qui avait demandé que la sentence soit commuée en prison à vie, n'a pas eu d'effet.

Le condamné a été prévenu le matin même qu'il allait être exécuté. Il a pu voir quatre membres de sa famille de bon matin (8h30) pendant trois quarts d'heure, puis il a été emmené et exécuté par injection létale.

A midi, sa mort a été confirmée par le vice-président philippin, en déplacement en Indonésie.

La société chinoise est très égalitaire : ces dames ont autant droit à la peine de mort que ces messieurs.

A Chongqing (une des rares grandes villes industrielles qui ne soit pas sur la côte orientale), une femme vient d'être exécutée le 7 décembre 2011 pour avoir monté et dirigé un réseau mafieux de prostitution forcée.

Le justice et la presse chinoises lui attribuent plusieurs centaines d'enlèvements et de prostitutions forcées. Si c'est vrai sans exagération, cela donne une idée de l'importance de son gang.

Une fermière chinoise reconnue coupable d'empoisonnement du lait d'une autre exploitation en avril dernier vient d'être condamnée à mort.

Les autorités chinoises ne communiquent que rarement ce genre d'actualité judiciaire, sauf quand la communication permet de calmer une inquiétude ou un mouvement populaires - notamment quand elle permet de dédouaner les autorités des soupçons ou des griefs qui pèsent sur elle.

Etrange retour à la surface d'une condamnée à mort chinoise qui a été exécutée en juin 2003 : elle avait fait l'objet d'un reportage et de photographies la veille de sa mort, pour un article qui n'a finalement jamais été publié parce que la rédaction du journal craignait les "réactions inappropriées" de ses lecteurs, tant la condamnée attirait l'empathie.

Les photos se sont finalement retrouvées sur un site Web hong-kongais le mois dernier et ont suscité des réactions parmi les bloggueurs chinois, qui se sont lâchés envers leurs responsables corrompus qui auraient du, selon eux, être exécutés à sa place. La journaliste et le photographe qui avaient pris les clichés ont réussi à faire le buzz autour de He Xiuling, huit ans après sa mort...

En d'autres circonstances, ces mêmes blogueurs ou leurs semblables appellent à la condamnation à mort de tous ceux qui leur semblent asociaux, amoraux, antichinois ou que sais-je d'autre...

Oui... il y a comme un certain décalage entre l'idée de la mort que l'on donne et celle qui est reçue...

Les commanditaires de l'article de 2003 l'avaient bien compris puisqu'ils n'avaient pas publié l'article, justement pour ne pas soulever une vague d'empathie de leurs lecteurs. Et pourtant, les éxécutions étaient publiques...