" Le 21 avril 1949, les exécuteurs viennent à Angers pour la troisième fois en moins de deux ans. Cette fois, c’est une femme qu’ils vont exécuter. Germaine Leloy est devenue veuve Godefroy volontairement le 10 décembre 1947. Cette marchande de charbon de Baugé a découpé son époux à coups de hache pendant qu’il dormait. Mobile du crime : vivre avec son amant, un valet de ferme plus jeune qu’elle. Le domestique, au courant des intentions criminelles de sa maîtresse, fut traduit en justice en même temps que la meurtrière et condamné à 20 ans de prison pour complicité !
En y réfléchissant, son crime se déroulait sous de mauvais auspices : en effet, au lendemain du meurtre, le 11 décembre, alors que Germaine passe sa première nuit en prison, Desfourneaux se trouve à la prison de Melun pour Lucienne Fournier. Cette semi-clocharde quadragénaire avait elle aussi tué son mari, un vieillard de trente ans son aîné. Le soir même des noces, avec la complicité de ses filles et du petit-fils de son mari, elle balance le vieillard dans la Marne du haut d’un pont !
Quand elle réalise le sort qui l’attend, Lucienne se montre très lâche : suppliant les exécuteurs de l’épargner, versant de grosses larmes. Il faut la force des quatre bourreaux pour l’entraîner vers la bascule, et au dernier moment, pour reprendre la formule de Georges Perruchot, « elle a pissé de frayeur. » Sur la bascule, revenant sur les aveux qu’elle avait répétés tout au long du procès, elle crie : « Je n’ai rien fait ! Je n’ai rien fait ! »
En 1948, Vincent Auriol a rejeté la grâce d’une seconde femme, Madeleine Mouton, femme de gendarme en Algérie, empoisonneuse de onze personnes, dont sept n’ont pas survécu. Elle est guillotinée à Sidi-bel-Abbès le 10 avril 1948. Après s’être évanouie au réveil, elle lutte tant pour résister aux exécuteurs d’Alger qu’elle arrive sur la bascule le corsage ouvert et la jupe relevée en gémissant : « Mes enfants ! »
Germaine Leloy mourra beaucoup plus courageusement. A son réveil, à 4h30, « elle pâlit et s’habille en silence, aidée de deux détenues avec lesquelles elle partage sa cellule. »
Après un entretien avec l’aumônier Moreau, elle rédige une longue lettre, se confesse, assiste à la messe. Après la bénédiction, elle refuse le rhum et la cigarette. Une fois de plus, Perruchot se souvient d’elle :
« Une femme très digne, elle nous parlait d’une voix douce, on était tous émus. Je lui ai coupé sa chevelure, puis, quand j’ai donné des coups de ciseaux dans son corsage pour dégager ses épaules, mais pas trop bas pour qu’on ne voit pas sa poitrine, j’ai vu qu’elle avait dissimulé des images pieuses. Malgré le règlement, on les lui a laissées. Elle est morte en murmurant des prières. »
A 5 heures 50, Henri fait tomber le glaive. C’est la dernière fois qu’on exécute une femme en France. La dernière condamnation d’une femme sera prononcée en 1973, sur l’île de la Réunion."
Extrait d'"Employé de bourreau", ma biographie de Desfourneaux.
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"Les humains, pour la plupart, ne se doutent de rien, sans envie ni besoin de savoir, ça leur va comme ça, ils croient avoir de l'emprise sur les choses.
- Mh... pourquoi en avoir fait un secret ? Ils peuvent comprendre, ils sont intelligents...
- Une personne, sûrement, mais en foule, on est cons, on panique comme une horde d'animaux, et tu le sais."