Bonsoir Bill
Je pense que l'une des réponses les plus probables, vous l'avez vous même citée. Le problème de transport est vraisemblablement en cause : l'un des actes reprochés par l'occupant aux Résistants était de faire sauter les voies ferrées, et vu que la Bécane circulait en train...
Autre raison : il est plus que probable qu'en juin 1944, en premier lieu, on ait songé à envoyer Desfourneaux et ses hommes à Douai pour exécuter Deflette, Malle et Masson. Mais les autorités ont certainement dû se raviser vu le débarquement des troupes alliées en Normandie le 6 juin.
De plus, c'eut été dangereux pour les bourreaux : les exécuteurs étaient suspectés, mine de rien, de trahison, puisqu'ayant obéi à l'Etat français, même dans ses ordres les plus vils. Rappelons également qu'à la prison de Cuincy, en 1942 et 1943, Desfourneaux et ses hommes avaient eu à guillotiner quatre résistants. Si en pleine Libération, ils étaient tombés entre les mains des amis de leurs victimes, je vous laisse imaginer...
C'est également sûrement l'enquête de "moralité" faite au sujet des bourreaux entre 1944 et 1946 qui a dû retarder leur "remise en route".
Après, il y a eu une autre raison au fait d'envoyer les criminels de droit commun au poteau : la facilité. Les pelotons fonctionnaient à plein régime pour les collabos, on pouvait, entre deux traîtres, passer par les armes un assassin.
Petite précision pour en terminer sur le sujet des transports : c'est à partir d'août 1947, avec l'exécution de Schuller, que les bourreaux ont commencé à utiliser un camion Renault pour transporter les bois de justice.
Ensuite, on se souvient qu'il a fallu le temps de retrouver la guillotine pour exécuter Petiot. L'histoire dit qu'on n'en a retrouvé qu'une seule dans un entrepôt. Exécuter à Paris n'était pas un souci : les bourreaux avaient toutes les pièces détachées dans le hangar à la Santé. Mais comment faire en cas d'oubli au cours d'un déplacement ? Un boulon manquant, un ressort défoncé ? Comme il était périlleux de n'avoir qu'une seule machine en état de fonctionnement (sujette à usure, comme tout outil qui se respecte), il est possible que le gouvernement en ait fait construire une autre dans le courant du 2e semestre 1946-1er semestre 1947. Le temps nécessaire pour la fabrication expliquerait aussi le délai long de remise en marche des bourreaux en province.
En fait, toutes ces raisons réunies peuvent expliquer le manque à gagner des bourreaux trois années durant. Un manque à gagner qui fut rattrapé - ô combien - les années suivantes !
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"Les humains, pour la plupart, ne se doutent de rien, sans envie ni besoin de savoir, ça leur va comme ça, ils croient avoir de l'emprise sur les choses.
- Mh... pourquoi en avoir fait un secret ? Ils peuvent comprendre, ils sont intelligents...
- Une personne, sûrement, mais en foule, on est cons, on panique comme une horde d'animaux, et tu le sais."