M. DEIBLER EN VOYAGE
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Brest, 27 avril. - M. Deibler est arrivé ce matin, à huit heures, à Morlaix pour l'exécution de Combot, condamné à mort, le 2 février dernier, par la Cour d'assises de Quimper. L'exécution capitale aura lieu demain matin, à cinq heures, sur la place Saint-Nicolas.
M. Deibler s'est présente à son arrivée dans un hôtel de la rue de Brest, qui a refusé de le recevoir; il est allé ensuite dans un autre de la même rue.
La Presse, n° 342 du 28 avril 1893Le Petit Journal, n° 11 081 du 28 avril 1893 UNE EXECUTION CAPITALE
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Morlaix, 28 avril. - Combot a été exécuté ce matin à, cinq heures.
La guillotine avait été dressée à quelques mètres et en face de la porte du cimetière ; le montage était terminé vers trois heures et demie.
Cinq brigades de gendarmerie, le bataillon du 118e, les agents de police, sous la direction du commissaire de la ville, maintenaient la foule devenue très compacte depuis deux heures.
A 4 heures, M. DeibIer a fait retomber deux fois le couteau pour en essayer le fonctionnement ; il est monté ensuite dans le fourgon avec ses aides pour aller prendre le condamné.
Combot a été réveillé à 4 h. 10.
Depuis plusieurs jours, il espérait sa grâce, et ne s'attendait pas à être exécuté. Hier soir il s'était endormi fort gai.
M. Samson, procureur de la République, lui dit que son recours en grâce était rejeté, qu'il fallait s'attendre à mourir.
Combot s'écria, « Je demande pardon à Dieu et aux hommes de ce que j'ai fait. »
Quand il fut habillé, il protesta de ce qu'on ait attendu 85 jours pour l'exécuter. « On aurait dû, a-t-il dit, m'exécuter plus tôt. » On le laissa seul avec l'aumônier et il accepta l'offre d'entendre la messe à laquelle il assista en priant dans la chapelle de la prison.
Avant de quitter sa cellule, il prit du café et du rhum.
La messe terminée; il fut conduit dans le cabinet du gardien-chef où a eu lieu la toilette. Il se plaignit qu'on le serrait trop.
« Vous me faites mal », dit-il. Puis, quand on lui coupa les cheveux, il s'écria :« Ce n'est pas la peine de me couper les cheveux, puisqu'on va me couper la tête. »
A 5 heures moins un quart, il monta dans un fourgon, escorté de deux brigades de gendarmerie à cheval et d'un piquet d'infanterie. La place Saint-Nicolas étant située sur une hauteur, il fallut près d'un quart d'heure au fourgon, traîné par trois chevaux, pour atteindre la guillotine.
Pendant le trajet, Combot causa en breton avec l'aumônier. Il lui dit a. plusieurs reprises qu'il regrettait son crime. Il descendit, soutenu par un aide, du fourgon,, marcha tout seul jusqu'à la guillotine. L'aumônier, très ému, l'a embrassé une dernière fois.
Une minute après l'arrivée du fourgon, le couteau tomba. Il était juste cinq heures et il faisait déjà grand jour.
Le panier a été immédiatement transporté au cimetière où le corps a été inhumé sans être livré aux médecins. Quelques instants après, l'aumônier est venu bénir la fosse.
Pendant la mise en bière, plusieurs personnes présentes ont remarqué que les lèvres et les artères du cou remuaient encore ; les mains, trop serrées au poignet, étaient devenues noires.*La foule était énorme, mais très tranquille, et elle s'est écoulée sans cris après l'exécution.
La Presse, n° 343 du 29 avril 1893