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Sujet: Adèle Blanc-Sec Dim 13 Juin 2021 - 0:45
Fantaisie de bon aloi des Aventures extraordinaires d'Adèle Blanc-Sec qui se déroulent dans la perspective spatio-temporelle éclatée d'un 1912 dont les antécédents remontent à l'Égypte ancienne de tel médecin de Ramsès II que l'héroïne cherche à convoquer au chevet de sa soeur inguérissable, ou de tel ptérodactyle de l'ère jurassique qui a éclos de son oeuf au Jardin des Plantes et qu'elle apprivoise et enfourche pour voler à la rescousse de son ami Espérandieu qu'elle a échoué à faire évader de la Santé et dont Armand Fallières lui refuse la grâce : sur cette monture la voici qui fond dans la cour de la prison et y enlève cet Espérandieu à un sous-Deibler de peu d'envergure qu'elle bouscule et qui, en perdant l'équilibre, se projette lui-même sous le couteau!
Ce n'est évidemment qu'après l'exécution de Max Bloch le 2 juin 1939, et au lendemain du scandale provoqué par les prises de vue captées lors de celle d'Eugène Weidmann à Versailles le 17 suivant, que le successeur d'Anatole Deibler Henri Desfourneaux reçut l'ordre de cesser d'officier sur le boulevard Arago le long du mur de la Santé, à une douzaine de mètres de la rue Messier, et de procéder plutôt à huis clos dans la cour d'honneur de la prison où survient ici la Blanc-Sec, et c'est par pur caprice que son Espérandieu, avant qu'elle ne le délivre, a été autorisé à s'engagouler de noir, le voile noir étant réservé jusqu'à son invalidation en 1958, non pas comme une faveur mais comme un marque d'infamie, aux seuls rarissimes parricides de l'engeance du Georges Duchemin qui a justement étrenné la guillotine sur le boulevard Arago le 5 août 1909.
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Dauner Exécuteur cantonal
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Sujet: Re: La Veuve va au cinéma - films Dim 13 Juin 2021 - 18:11
Ah, ces cinéastes… Tellement peu informés.
Titange Exécuteur cantonal
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Sujet: Re: La Veuve va au cinéma - films Lun 14 Juin 2021 - 1:13
Vous comprenez certainement que Luc Besson était au fait des détails que j'expose mais qu'il a voulu faire une oeuvre de fiction en marge de l'histoire.
Nemo Fondateur
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Sujet: Re: La Veuve va au cinéma - films Lun 14 Juin 2021 - 1:44
Je ne suis pas convaincu que Luc Besson ait été spécialement intéressé par les circonstances exactes d'une exécution capitale dans les années 1910.
Il faut toujours conserver en mémoire cette phrase prononcée par Antoine Duléry dans Meilleur espoir féminin :
"On ne fait pas un reportage sur la coiffure. On fait un film."
Le cinéma est une interprétation de faits. Oui, en bon puristes, on préférerait sans doute davantage d'authenticité, mais il faut reconnaître un détail, c'est qu'à part nous, tout le monde se fout de la précision du sujet de la peine de mort.
Les gens ne savent pas que la guillotine est un appareil étroit et haut : pour eux, deux montants de trois mètres, et distancés d'un mètre, entre lesquels coulisse une lame non lestée, c'est très crédible. Les gens ignorent que l'échafaud ne servait plus dès 1871 : même dans le très sérieux L'Abolition, il y a une estrade sur laquelle repose la guillotine. Les gens pensent que jusqu'au dernier jour d'utilisation de la bécane, on attachait le condamné à la bascule, qu'on attendait un signal du procureur pour libérer le couperet, que le système de chute se fait par la pression d'un bouton par le pouce du bourreau.
Je le répète d'expérience, et j'ai hâte que vous puissiez voir à votre tour le résultat dans les mois à venir, même avec la meilleure volonté du monde, il est difficile d'obtenir une reconstitution d'exécution fiable à 100%. Dans ce téléfilm auquel j'ai participé l'an dernier, je peux vous citer plusieurs détails que je n'ai pu améliorer lors du tournage, détails que je continue à regretter amèrement : - l'accessoiriste n'a pas obtenu de bassine pour la tête, et nous avons dû nous contenter d'un panier d'osier - inexact, même au temps de la révolution. - la guillotine a été montée, pour faire durer la scène, plus loin que nécessaire de la porte de la cour - à environ dix mètres au lieu de trois. Cela ne change rien, cela reste malgré tout moins long que la scène d'exécution qui débute le film Fou d'amour, et où il faut au moins seize secondes pour aller de la porte de la prison à la bascule... - faute de cordes suffisamment longues, j'ai dû attacher uniquement les poignets du comédien comme j'ai pu, alors que normalement, il aurait fallu disposer d'une bonne longueur, et commencer par attacher les coudes ensemble avant de relier les poignets, d'une manière assez similaire aux techniques de bondage.
J'ai pourtant été engagé sur ce tournage comme conseiller technique pour rendre la scène aussi crédible que possible, et de toute évidence, elle sera assez conforme à la réalité, même si imparfaite : l'exécution qu'elle présente est un élément crucial de l'histoire, et pas une simple scène distrayante ! Alors, imaginez quand on a affaire à une grosse machine "hollywoodienne" comme l'adaptation d'Adèle Blanc-Sec - je n'ai pas détesté le résultat final, ceci dit, car le tout comporte bien d'agréables éléments.
_________________ "Les humains, pour la plupart, ne se doutent de rien, sans envie ni besoin de savoir, ça leur va comme ça, ils croient avoir de l'emprise sur les choses. - Mh... pourquoi en avoir fait un secret ? Ils peuvent comprendre, ils sont intelligents... - Une personne, sûrement, mais en foule, on est cons, on panique comme une horde d'animaux, et tu le sais."
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Filomatic Monsieur de Paris
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Sujet: Re: La Veuve va au cinéma - films Lun 14 Juin 2021 - 2:36
Citation :
Pas faciles à digérer les quinze ou vingt minutes médianes du Trio infernal pendant lesquelles Georges Sarret et ses maîtresses les soeurs Schmidt liquéfient leurs convives de Noël Louis Chambon et Noémie Bellandraux dans des baignoires remplies d'acide sulfurique avant de revêtir des masques à oxygène pour en chaudiérer les grumeaux putrides au fond de la cour de leur villa de l'Ermitage, à Aix-en-Provence, et les y ensevelir.
Michel Piccoli tuerait à nouveau dans le film 'Les Noces rouges' (1973), de Claude Chabrol, un criminel potentiel, au nom de l'amour. Très intéressant film. On les voit arrêtés, mais on ne voit pas de procès, pas 'la bècane' non plus. Chabrol ne le montre généralement pas.
L'assassin Piccoli, mais cette fois sans vitriol...
Nemo Fondateur
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Sujet: Re: La Veuve va au cinéma - films Lun 14 Juin 2021 - 2:43
Le véritable criminel ayant inspiré l'histoire, Cousty, ayant été condamné à mort, puis condamné à perpétuité lors d'un second procès, il aurait été superflu de montrer son exécution...
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Titange Exécuteur cantonal
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Sujet: Re: La Veuve va au cinéma - films Lun 14 Juin 2021 - 4:15
Sans doute Claude Chabrol fait-il preuve ici en 73 d'une discrétion qui manque totalement à Girod en 74 et qui lui est assez familière : pensez à son grand chef-d'oeuvre de Landru en 1963, où aucun des assassinats du célèbre séducteur n'est donné à voir et où quelques-uns seulement sont évoqués par des allusions, mais des allusions d'une efficacité saisissante comme quand au milieu de la valse Geschichten aus dem Wienerwald de Johan Strauss junior il disparaît hors champ avec sa danseuse Marie Guillin au profit d'un zoom extraordinaire sur la cuisinière où il va incessamment la mettre à cuire dans la pièce d'à-côté.
Ceci dit je trouve que Chabrol ne s'est pas maintenu à cette hauteur dans l'opus des Noces rouges que vous évoquez et qui m'a laissé assez tiède.
Et puisque nous y sommes j'aimerais abonder dans le même sens que Nemo en soulignant qu'il aurait en définitive été mal inspiré de déroger à sa retenue habituelle dans le cas du modèle de son Piccoli, Bernard Cousty, un condamné à mort qui en avait appelé de sa sentence rendue le 2 juin 1972 et pouvait la voir éventuellement adoucie comme elle l'a effectivement été, commuée en prison à vie le 28 mars 1973, deux semaines à peine avant le lancement du film.
Dauner Exécuteur cantonal
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Sujet: Re: La Veuve va au cinéma - films Lun 14 Juin 2021 - 18:59
Je suis tout à fait d'accord avec Nemo. J'ai voulu me moquer gentiment. C'est pour sourire.
Filomatic Monsieur de Paris
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Sujet: Re: La Veuve va au cinéma - films Mar 15 Juin 2021 - 1:26
1836 L'exécution de Pierre François Lacenaire et Pierre Victor Avril, dans 'Lacenaire' (1990), de Francis Girod avec Daniel Auteuil.
* Quel bourreau est-il censé être ?
La place de l'échafaud et le public
Nemo Fondateur
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Sujet: Re: La Veuve va au cinéma - films Mar 15 Juin 2021 - 1:39
Le bourreau de Paris en 1836, c'est Henry Sanson, assisté par son fils Henri-Clément.
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Titange Exécuteur cantonal
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Sujet: Guillotines miniatures Dim 20 Juin 2021 - 0:59
Le patron de l'inspecteur Clouseau Peter Sellers, le commissaire Dreyfus, peut s'enorgueillir de posséder sur son bureau, dans la remarquable comédie A Shot in the Dark de Blake Edwards, une guillotine coupe-cigares aussi splendide que celle du colonel Lucien dans le Devil's Island de William Clemens, un autre film d'une grande qualité mais qui, tout en ravissant les cinéphiles, n'a pas connu le même immense succès populaire -
ou que leur semblable avec laquelle on s'amuse à découper des asperges à table chez La Fayette dans le Jefferson à Paris de James Ivory :
Dernière édition par Titange le Dim 22 Aoû 2021 - 18:23, édité 1 fois
Titange Exécuteur cantonal
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Sujet: The Stripper Mer 23 Juin 2021 - 1:03
Demeurée célibataire malgré de grandes qualités de coeur et un physique avantageux, Lila Green tâte en vieillissant du métier d'effeuilleuse après avoir vivoté comme actrice dans une troupe de variétés ambulante où, dans un sketch sur 1793, elle exposait sa jolie frimousse à la fenêtre des Sanson : The Stripper de Franklin J. Schaffner ou les vicissitudes des femmes sans qualification professionnelle en 1963 à une époque où elles commençaient à peine à être encouragées à en obtenir une.
Titange Exécuteur cantonal
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Sujet: Caroline chérie Dim 27 Juin 2021 - 0:51
Avant d'être réunie à nouveau sous Bonaparte à l'homme de sa vie, le noble démocrate Gaston de Sallanches à qui elle a offert son pucelage le jour de son seizième anniversaire, le 14 juillet 1789, et qui dans l'intervalle s'est taillé une brillante carrière dans les armées de la République, Caroline de Bièvre, la Caroline chérie de Richard Pottier, traverse pendant la Révolution, en tant qu'épouse du député girondin proscrit Georges Berthier, des heures difficiles d'errance et de clandestinité, abusée par exemple par le postillon qui l'a reconduite à l'auberge, à Caen, et l'a convaincue de le suivre à la grange :
« - Le Comité du pays a appris que vous êtes la citoyenne Caroline Berthier. C'est un voyageur qui vous a reconnue. J'étais présent quand ils ont décidé votre arrestation. Dans cinq minutes ils seront là. Mais ayez confiance en moi. Je connais bien l'auberge, je vais vous cacher dans la grange (...) - Ah! merci, monsieur, merci! - Vous me remercierez tout à l'heure, venez!»
Le fond de sa misère, Caroline l'atteint lorsqu'elle tombe dans le cercle des financiers libidineux Van Krift à la pension Belhomme que le scénariste Jean Anouilh dépeint ainsi dans l'un de ses superbes textes de transition liant les principaux épisodes du film : «Le docteur Belhomme, qui disposait de puissantes protections, avait trouvé cet élégant moyen de faire rapidement fortune : fabriquer des certificats médicaux de complaisance aux hôtes de la Conciergerie qui avaient les moyens de payer pension chez lui et les interner dans sa maison de santé. La maison Belhomme était en effet une maison de santé extrêmement coûteuse où on ne guérissait que d'une seule maladie à vrai dire mortelle, la guillotine».
Casée là au grenier, à la paille, pour la somme considérable de «1,000 francs» par jour, la citoyenne Berthier ne peut déjà plus les payer quand elle emménage avec l'empathique comte de Boismussy qui loge à la pistole, à l'étage, pour sept ou huit fois ce prix malgré ses revenus limités, parce qu'il préfère «vivre moins» mais «bien vivre», et qui la console de son mieux des affronts des Van Krift et du spectacle lamentable de la «duchesse» sur le retour Yvonne de Bray qui cherche à vendre à Belhomme un faux bijou qu'elle dit tenir de son «Bien-Aimé» Louis XV.
Le rondouillet Raymond Souplex en Belhomme et la sèche Germaine Kerjean dans le rôle de sa gouvernante forment ici un couple d'oppresseurs mémorables; ne s'oublient pas davantage les commères Bouchon et Poilu, les portières de la magnifique ruine d'immeuble que l'«architecte-décorateur» Jacques Krauss leur a fabriquée dans une rue de l'Arbre-Sec où au début de sa disgrâce Caroline tente en vain de se poser incognito : «Ah! quelle drôle d'époque citoyenne Poilu. Avec les escaliers à faire et le temps qu'on passe à dénoncer les locataires, on n'a même plus une minute pour aller voir guillotiner les gens!»
Titange Exécuteur cantonal
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Sujet: Eric von Stroheim Jeu 1 Juil 2021 - 1:24
En 1946, «l'homme que vous aimerez haïr» Erich von Stroheim assume pour Lew Landers le rôle de l'hypnotiseur maléfique Diijon dans The Mask of Diijon, un petit film de série B qui sans son interprétation feutrée ne vaudrait que par l'humour incisif des deux parenthèses qui l'encadrent : en intro en effet nous avons ici, mise en scène par la femme et collaboratrice de l'hypnotiseur qui tente de le persuader de renouer avec son ancien emploi moins inquiétant de magicien, une guillotinade fictive au terme de laquelle, du fond du panier où sa tête est tombée, elle lui demande dans un sourire : «how did I do?» en espérant, mais en vain, l'avoir fléchi par son numéro, et au dénouement nous avons comme en contrepoint la guillotinade réelle du héros qui, retranché dans la boutique d'articles de magie de leur connaissance Sheffield, le Sheffield's Magic Shop, et assailli par la police qui l'enfume de gaz lacrymogènes, trébuche et s'insère de lui-même entre les montants d'une guillotine dont un chat noir de service déclenche sur ces entrefaites le mécanisme en s'agrippant à la corde qui retient le couperet - et vlan, c'est la fin de Diijon...
_____________________
L'impayable von Stroheim grillant une cigarette entre deux prises de vue.
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smic77230 Monsieur de Paris
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Sujet: Re: La Veuve va au cinéma - films Jeu 1 Juil 2021 - 17:07
Bonjour Titange, merci à vous de nous faire partager ces films d'une autre époque
Titange Exécuteur cantonal
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Sujet: Re: La Veuve va au cinéma - films Ven 2 Juil 2021 - 5:07
Tout le plaisir est pour moi qui en ai encore dix ou douze à vous présenter au cours des prochaines semaines.
J'espère seulement que vos accaparantes recherches vous laissent le temps d'en visionner quelques-uns.
Titange Exécuteur cantonal
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Sujet: Flic Story Lun 5 Juil 2021 - 7:11
L'inspecteur Roger Borniche met presque trois ans à traquer l'«ennemi public numéro un» Émile Buisson, évadé de l'hôpital pénitentiaire de Villejuif le 3 septembre 1947, avant de le capturer le 10 juin 1950 à Claville près d'Évreux, à l'Auberge de la Mère Odue renommée la Mère l'Oie dans le film Flic Story de Jacques Deray où Alain Delon et Jean-Louis Trintignant excellent dans les rôles d'un Borniche moins cool qu'il ne le voudrait, un brin nerveux même sans doute à en juger par les cigarettes qu'il fume à la chaîne, et d'un Buisson au sang-froid imperturbable qui durant ce laps de temps, «arrivé à un point de non-retour» où il n'a pas le choix que d'éliminer ceux qui lui résistent, ajoute six nouvelles victimes, dont un motard de police, à son lourd palmarès d'assassin incluant le convoyeur de fonds Henri Guérin abattu au cours d'un braquage fameux de quatre millions de francs perpétré au détriment du Crédit industriel et commercial à Paris, rue de la Victoire, le 24 février 1941, en compagnie d'Abel Danos.
Qui cherche à savoir comment les hôtes frivoles d'un restaurant chic peuvent être dépouillés subito presto de leur argent et de leurs objets de valeur n'a qu'à visionner l'attaque du restaurant l'Arbois de la place de l'Étoile à laquelle se livrent ici «Mimile» et quelques comparses : en l'espace de 90 petites secondes dûment chronométrées, c'est proprement foudroyant.
Aux interrogatoires musclés auxquels inclinent ses adjoints et qui lui rappellent fâcheusement la Carlingue de la rue Lauriston, ses baignoires et ses électrochocs, Borniche préfère sa propre méthode immatérielle du chantage aux sentiments qu'il exerce tantôt par exemple sur la dénommée Suzanne Bollec qu'il force à devoir lâcher soit Buisson ou soit son frère René («Votre frère ça vous ferait rien qu'il finisse sur la guillotine?»), et tantôt sur le quidam Paul Robier qui se résout à lui livrer la piste décisive de la Mère l'Oie en échange du médicament susceptible de guérir sa femme cancéreuse : «Ta femme, pour la sauver il faut de la streptomycine, et de la streptomycine je te trouverai un moyen de t'en faire venir des États-Unis, je te le promets».
Les six ou sept dernières minutes de Flic Story comptent parmi ses meilleures alors que les protagonistes fraternisent en des tête-à-tête presque silencieux officiellement consacrés à étoffer le dossier de Buisson, déjà «haut d'un mètre cinquante», mais en réalité plutôt occupés à commenter l'actualité et à boire un verre de vin ensemble en attendant le procès de janvier 1954 et le couteau d'André Obrecht le 28 février 1956.
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Sujet: Musées de cire hollywoodiens Jeu 8 Juil 2021 - 4:35
Tant le Wax Museum de Michael Curtiz en 1933 que son remake House of Wax d'André de Toth en 1953 recèlent une guillotine parmi les exhibits offerts à la curiosité de leur clientèle par les sculpteurs psychopathes Ivan Igor et Henry Jarrod acharnés à couronner leurs mannequins de cire des têtes réelles d'ennemis qu'ils se sont faits ou de femmes dont ils sont tombés amoureux et à qui ils trouvent une ressemblance avec Jeanne d'Arc ou Marie-Antoinette auxquelles ils sont morbidement attachés.
Au dénouement de House of Wax, le factotum de Jarrod incarné par Charles Bronson, secondé par un moine ténébreux entièrement revêtu de noir, n'a plus besoin que de quelques secondes pour expédier ad patres le fiancé de leur Marie-Antoinette qui a le cou rentré dans la lunette quand la police vole à son secours.
À l'instar de Bronson chez de Toth brille chez Curtiz Lionel Atwill pour qui Fay Wray constitue une prise de choix à la veille de King Kong.
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Titange Exécuteur cantonal
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Sujet: Ernst Lubitsch Lun 12 Juil 2021 - 0:47
Après avoir charmé son public pendant quatre-vingt-dix minutes par la finesse de sa critique de la cour de Louis XV, Ernst Lubitsch, pressé de conclure son Madame Du Barry, ne lui sert sur la Révolution qu'un bref intervalle d'images d'Épinal reliées par des fondus enchaînés, du «glorieux» 14 Juillet à l'«infâme» invasion des Tuileries et de l'exaltante Marianne à bonnet phrygien au minable cordonnier en sabots, avant de sombrer dans un dix minutes de poncifs indigestes à propos de la «sauvagerie» de la Terreur :
Dénoncée par son ancien page noir Zamor qui, en accédant à l'égalité patriote, l'a prise en grippe, l'héroïne de Lubitsch, qui demeure coquette jusque dans son cachot de la Conciergerie où un galant téméraire lui paie une visite, n'est tirée de là que pour être emmenée sans ménagement à trois bourreaux primitifs, le torse et les pieds nus, qui l'enfournent dans une guillotine gigantesque et lancent sa tête au loin, comme une pâture sacrificielle, à une foule régressive en délire...
- Notice démarquée du 200 ans de guillotine. Une histoire de l'abolition de la peine de mort en France qu'André Bertrand a publié chez Amazon sous l'ISBN 9798709790117.
Dernière édition par Titange le Sam 1 Oct 2022 - 1:05, édité 2 fois
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Sujet: Sade à la barrière du Trône Mar 3 Aoû 2021 - 1:53
Quelle pouvait être l'ambiance à Picpus dans l'ancien couvent des chanoinesses de Saint-Augustin réaménagé en maison de santé par Eugène Coignard quand le marquis de Sade y échoua en mars 1794 et comment ses pensionnaires ont dû composer en juin et juillet avec les fosses creusées dans son jardin pour y recevoir les guillotinés de la barrière du Trône voisine de quelques centaines de mètres, c'est ce dont le film Sade de Benoît Jacquot donne en 2000 un aperçu tandis que dans une veine plus lyrique, le prologue de Quills de Philip Kaufman, Mademoiselle Renard, illustre en cette même année 2000 les affres de la jeune aristocrate éponyme que le romancier-narrateur, logé au-dessus de l'échafaud même, imagine assujettir à la lubricité d'un Capeluche masqué qui promène ses mains sales sur son cou blanc avant de la coucher sur la bascule :
«Cher lecteur, j'ai à vous raconter une histoire grivoise cueillie dans les pages de l'Histoire. Elle est un peu choquante, c'est vrai, mais je vous garantis qu'elle stimulera vos sens. C'est l'histoire de Mademoiselle Renard, une ravissante jeune aristocrate dont les inclinaisons sexuelles parcouraient toutes les nuances allant de la séduction à la bestialité. Qui n'a rêvé de s'abandonner à tous les spasmes de la luxure, d'assouvir chacun de ses désirs dépravés? En raison de sa noble naissance, Mademoiselle Renard bénéficiait d'une totale immunité pour faire précisément cela, infliger la douleur et le plaisir avec un égal enthousiasme. Jusqu'au jour où... Mademoiselle se retrouva à la merci d'un homme en tous points aussi pervers qu'elle-même, un homme dont l'habileté dans l'art de faire souffrir surpassait la sienne...»
Que l'héroïne de cette saynète, dégriffée, soupire, «non, je vous en supplie», n'apitoie aucunement son bourreau qui la sacrifie à un public en liesse alors que le narrateur conclut : «Avec quelle facilité, cher lecteur, le prédateur ne se transforme-t-il pas en proie? Et avec quelle rapidité le plaisir n'est-il pas retiré à certains pour être donné à d'autres?»
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Sujet: Mademoiselle Mimi Ven 6 Aoû 2021 - 1:23
Savoureux petit sketch Mademoiselle Mimi de Philippe de Broca et Daniel Boulanger, dans Le plus vieux métier du monde, sur une rouée qui pendant la Révolution, maîtresse d'un puissant du jour, un commissaire du peuple, prodigue également ses faveurs par calcul à «un capitaine, un Corse», «un jeune homme» qui représente «un parti possible» pour elle dans l'avenir, du moins le croit-elle, bref à Bonaparte, tout en ayant aussi des bontés pour les nobles de passage un peu dévoyés qui montent à sa chambre donnant sur l'échafaud à la fois pour ses charmes et pour sa fenêtre d'où ils peuvent voir trépasser à leur aise quelque connaissance ou quelque parent, même, comme le dénommé Philibert qui en l'occurrence lui propose un improbable mariage en cadeau après avoir applaudi à l'exécution de son oncle dont il va hériter : «ça y est, mon oncle, le marquis de Montaubert, couic, cette canaille n'est plus!»
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Sujet: Re: La Veuve va au cinéma - films Ven 27 Aoû 2021 - 22:56
La Veuve (enfin ce qui y ressemble) fait une apparition à 44m55, puis 53mn55 jusqu'à environ 1h00, dans le premier épisode de la série "Le roi mystère" (1991) :
https://youtu.be/E8n1x29fbks
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Sujet: De Sacha Guitry à Barry Sonnenfeld Mar 31 Aoû 2021 - 1:30
Après avoir été acquitté du meurtre de sa légitime qui éclusait «trois litres de vin par jour», gueulait «du matin au soir» et ne se lavait les pieds que «tous les deux mois», le Paul Braconnier du grinçant La Poison de Sacha Guitry est accueilli en triomphe dans son patelin de Remonville par des mômes qui en l'attendant jouaient à la guillotine avec un instrument de leur façon des plus approximatif en comparaison par exemple avec celui que le turbulent Pugsley Addams a réussi à mettre au point dans le Family Addams de Barry Sonnenfeld :
Sacha Guitry : La Poison, 1951, avec Michel Simon et Germaine Reuver. Barry Sonnenfeld : The Addams Family, 1991, où Jimmy Workman incarne Pugsley Addams et Christina Ricci sa soeur Wednesday qui rivalise de vitesse avec lui sur la pente de la délinquance et le convainc d'essayer sa chaise électrique :
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Titange Exécuteur cantonal
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Sujet: Mad Love Dim 12 Sep 2021 - 2:23
De nombreux transfuges de l'expressionnisme allemand contribuent dans le courant des années 1930 à l'essor du cinéma d'horreur américain comme le réalisateur-caméraman Karl Freund et l'acteur Peter Lorre, la vedette du M le maudit de Fritz Lang, qui en 1935 conjuguent leurs efforts pour livrer avec Mad Love la plus délicieuse adaptation possible des Mains d'Orlac de Maurice Renard sur le sujet d'un pianiste virtuose dépossédé de ses mains par un accident de chemin de fer et à qui un chirurgien tordu, amoureux transi de sa femme rébarbative, en greffe à leur insu de nouvelles qui, prélevées sur un guillotiné, le transforment en virtuose du lancer du couteau.
Sous le sarrau du chirurgien un Peter Lorre dans une large mesure absent à sa dimension professionnelle, à la voix traînante et qui, lorsqu'il sent que sa monomanie va le subjuguer, remet les clés de sa clinique à son assistant asiatique, M. Wong, et monte à l'étage y déverser les effluves de son orgue personnel sur une statue à l'effigie de sa flamme, la belle Yvonne qui au début de son mariage à Orlac, pour aider à assurer leur subsistance, a joué sans souci du qu'en-dira-t-on dans un certain Théâtre des horreurs où il l'a vue avec grand plaisir cadenassée des bras et des jambes, torturée et brûlée aux fers rien de moins que «quarante-sept» fois.
Sans l'ombre d'un doute le gâteau que ses collègues comédiens lui offrent à l'occasion de la petite fête organisée à la veille de son départ de ce théâtre mérite-t-il de figurer en bonne place dans un livre de recettes d'Halloween : sur le pourtour du gâteau une chaîne de squelettes et sur le dessus, au milieu, une guillotine miniature en sucre encerclée des mots Bon voyage Yvonne et Le théâtre perd une autre tête.
S'imprègne aussi dans la mémoire du spectateur de Mad Love le personnage de l'artiste de cirque Rollo interprété par Edward Brophy : créé dans le Freaks de Tod Browning sous les traits d'un acrobate inactif et méprisant, le revoici chez Freund dans la peau d'un lanceur de couteaux impulsif qui, accosté par un collectionneur d'autographes avant d'être exécuté, lui retourne en lui en rasant les oreilles son stylo à plume dont la pointe se fige dans la porte derrière laquelle il s'efface, une initiative périlleuse que son héritier Orlac n'hésite pas à imiter par la suite pour évincer de chez lui le créancier venu lui confisquer son piano.
La signature des Rollo et Orlac : le lancer du stylo à plume au ras des oreilles!
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itto Exécuteur cantonal
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Sujet: Re: La Veuve va au cinéma - films Lun 13 Sep 2021 - 13:25
Dans le roy mystère:Veuve fantommas ou Spectre 007?